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Le Manoir

Nous sommes aux portes de l’été, les journées sont longues et les nuits sont chaudes. La nature se transforme, s’assèche. Il ne fait bon vivre que proche d’un point d’eau où se baigner et trouver un peu de fraîcheur.

Sur des terres reculées de toute cohue touristique et de frénésies humaines, nous avons pris nos vacances dans un coin de campagne verdoyant et où l’eau est abondante. Comme pour nous reconnecter à la nature, nous n’avons que notre baluchon et une tente que l’on plante au gré de nos envies, ici et là, toujours à l’abri du monde. Nous passons nos journées à marcher de paysages en paysages, tous plus beau les uns que les autres. Nous nous nourrissons de ce que l’on trouve en fruit, un peu de pêche lorsque nous ressentons le besoin d’une pause au bord d’une rivière ou d’un lac. Nos activités vont de la lecture d’un roman que nous n’avons jamais pris le temps d’ouvrir jusqu’à présent, trop envahis par nos vies, à une baignade au milieu d’un lac, un parcours de santé improvisé et le soir venu, nous regardons les étoiles. Émerveillés de découvrir ou redécouvrir les petites choses de la vie que nous avions oubliée, mises de côté.

Occasion aussi de nous retrouver, retrouver une complicité, une complémentarité, faire renaître le désir, la flamme passionnelle qui nous avait mené l’un à l’autre. Autant dire que cette escapade en pleine nature avait fortement ravivé la flamme et nos ébats n’en étaient que plus intenses et d’une magie insoupçonnée. Nous prenions le temps de nous découvrir, de nous offrir, de jouer avec soi, avec l’autre, avec l’envie…

Cela faisait près d’une semaine que nous parcourrions ces champs et ces vignes sans jamais croiser âme qui vive. Ça n’était pas pour nous déplaire. Jusqu’à cet après-midi où au loin nous avons vu un mini château, une vieille demeure qui semblait sortir d’un autre âge. Mystérieux et intriguant, nous nous sommes approché pour en savoir plus sur ce lieu qui  semblait ne pas figurer sur nos cartes.

Du lierre courait sur les murs, le domaine semblait abandonné, un vieux puits trônait au mieux de la cour, un seau en bois sur le rebord, retenu par une vieille corde usée. Alentours des rangées de rosiers menant jusqu’à ce qui paraissait être la porte principale. Nous avions le sentiment de faire un bond dans le temps. Au dessus d’une porte en bois massive, des armoiries sculptées dans la pierre, avec une inscription semble-t-il en latin sur le linteau : «  Voluptas corporis animi laetitia  » (Les plaisir du corps font la joie de l’esprit). Ce lieu paraissait tout d’un coup plus mystérieux encore.

Nous avons touché la porte et soudain… Un flash ! Une scène des plus stupéfiantes. Nous nous vîmes assister à une orgie médiévale. Des bribes de scènes érotiques qui nous mirent en émoi. Ce fut bref, mais d’une telle intensité que nous en étions essoufflé une fois le flash dissipé.

Excités et troublés à la fois, nous avons fait demi-tour, remontant l’allée de rosier lorsqu’un grincement assourdissant retentit. C’était la grande porte qui venait de s’entrouvrir, sans que personne n’y apparaisse. Intrigués nous nous sommes regardés comme pour sonder l’autre et sonder sa curiosité. Nous prîmes cela pour une invitation et comme de toute façon personne ne semblait se montrer…

J’ouvris la porte en demandant s’il y avait quelqu’un, expliquant que nous étions de simples randonneurs intrigués par cette mystérieuse demeure. Aucun retour, pas un mouvement, pas un son. Pourtant l’intérieur était impeccable, pas un brin de poussière, ni toiles d’araignée. Seulement une odeur un peu particulière que nous n’arrivions pas à déterminer. Elle n’était pas désagréable, voir même tout le contraire. On se sentait comme transportés dans une autre dimension. Aux murs des tentures magnifiques, des tableaux de batailles, des portraits anciens d’hommes et de femmes en tenues d’époque. Des scènes de banquets, de fêtes et d’orgies, comme ce flash qui nous était apparu tout à l’heure. Régnait en ce lieu une atmosphère particulière, chaleureuse et intrigante à la fois. Atmosphère qui faisait naître en nous un désir ardent. Nous nous lancions des regards provocateurs, elle prenait des poses suggestives, une vraie tentatrice… Nous allions de salle en salle, chacune était plus étonnante que la précédente. Des salles de réceptions, des petits salons privés, les cuisines, une salle d’armes où l’on trouvait tout un panel de lances, d’arbalètes, d’armures et autres objets insolites dont j’ignore même les noms. Une salle où l’on pouvait voir des trophées de chasse. Étonnement nous sommes tombés sur ce qui semblait être une salle de bain. Risque, mais salle de bain tout de même. Un grand baquet en bois semblant servir de baignoire, une grande cheminée avec de nouvelles armoiries et là aussi l’atmosphère était électrisante, voir un tantinet érotique.

Un grand couloir desservait tout un tas de chambres, chacune avec un style différent, chacune avec sa cheminée, et un lit à baldaquin démesuré. De la soie, du velours, du marbre, du bois, tout était harmonieux et donnait une ambiance chaleureuse et conviviale.

De nouveau un flash nous est apparu, plus intense cette fois-ci. Nous étions accoutrés comme d’antan et ne tardions pas à nous départir de nos vêtements pour nous lover langoureusement dans ce lit immense. Elle attisait mon désir, jouant de sa délicieuse nudité, caressant ses jambes, ses hanches, s’arrêtant tendrement sur sa poitrine exquise. J’admirais le spectacle de ma courtisane s’offrir à moi, c’était divin. Me poussant sur le lit, elle me chevauchait, m’embrassait, frottant son sexe humide d’excitation contre le mien. Nos étreintes étaient tendres et passionnées. Nos corps chauds s’enlaçaient, s’entremêlaient, dans un ballet sensuel jusqu’à ce que prit dans le tourbillon de nos embrassades, nos corps ne fasse plus qu’un…

Comme un voile de brume qui se dissipe, le flash disparaît nous laissant haletants et troublés de ces ébats endiablés que nous venions de vivre sans même s’être touché. Nous étions tout excités, intrigués, un peu désemparés. Nous ressentions tous les effets d’avoir fait l’amour avec fougue et passion. Respiration saccadée, le cœur bondissant de nos poitrines, chaire de poule, spasmes d’excitation… Tout paraissait tellement réel, tellement puissant, c’était grisant.

Regardant dehors, nous vîmes que le soleil allait arriver en bout de course, et même si c’était assez amusant de jouer d’interdit, nous ne voulions pas prendre le risque d’être surpris par un éventuel propriétaire. Nous avons repris nos sacs à dos et avons quittés ce manoir intriguant.

De retour loin de tout, nous avons planté la tente, allumé un feu de camp et avons reparlé de cette expérience déroutante au manoir. Nous nous demandions ce qui avait à ce point pu influer sur nos sens pour nous faire vivre si intensément cet état d’excitation. Mais nos questions allaient rester sans réponses pour cette fois…

M.C.


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